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Fight Club, Analyse Séquentielle d'un Film Post-Moderne (3)

Suite de l'analyse séquence par séquence exprimant ma vision sur Fight Club, cette 3e partie s'étend du chapitre 11 "Complainte pour un canapé" au chapitre 15 "Bienvenue au Fight Club".


Cette 3e partie voit le narrateur recevoir de plein fouet la philosophie de vie de Tyler Durden, on suit ensuite les différentes activités professionnelles de ce dernier, on découvre son besoin d'être frappé, la maison pour le moins rustique où vont s'installer les personnages et au final le lancement du Fight Club à proprement parler.









Complainte pour un canapé

Les deux protagonistes principaux se retrouvent autour d'une bière et Jack s'étend sur la succession de déveines qu'il vient de subir. Comme nous sommes pour notre part déjà au courant (bagages perdus, appartement détruit), on prend la discussion au moment où Tyler a déjà entendu l'histoire. Après une interrogation sur le rôle de l'homme dans la société, ils conviennent qu'ils logeront ensemble puis sans raison apparente Tyler demande à être frapper par son vis-à-vis.

Dans cette scène, on touche à la quintessence du discours anti-consommation contenu dans l'œuvre mais en analysant très soigneusement les propos exprimés on comprend que ce qui est rejeté c'est "une" société de consommation plus que "la" société de consommation.
Autrement dit, OK pour l'extension des moyens d'information, la multiplication des passerelles de diffusion si c'est pour apprendre à se connaitre mieux nous-mêmes ainsi que nos voisins mais que penser de l'intérêt humaniste revêtit par les magazines "people" évoqué par Tyler ? A part qu'il est proche du néant.
Que penser d'un produit comme le viagra, dont l'humanité a pu se passer de tout temps et qui est devenue à présent, sous la pression de lobbys pharmaceutiques, un besoin reconnu ? De même, on pourrait croire à une contradiction interne quant au contenu du film et au moyen qu'il utilise pour être diffusé mais il n'en est rien : Oui le cinéma est voué à être consommé par la masse, mais non il n'a pas pour autant à être formaté voir régressif. Au début, Jack est décontenancé par les propos que Tyler martèle comme des évidences puis il y adhérera mollement. Sa réponse particulièrement morne et sérieuse quand Tyler dit "que ça aurait pu être pire une fille aurait pu te couper la pine pendant la nuit" prouve bien qu'il est encore dominé par ses certitudes et n'a aucune autre approche que celle du premier degré ("Oui, c'est des choses qui arrivent").

Un autre trait caractéristique de Jack ressort quand ayant quitté le bar, il n'ose aborder la seule chose qui l'a amené à reprendre contact avec Tyler : la nécessité de trouver un autre logement, provisoire croit-il alors. Le manque d'opportunisme du héros est encore au cœur de l'échange et son interlocuteur s'en amuse, de cela comme de sa rigidité :
-Arrête les préliminaires et demande
-Ce serait un problème ?
-Quoi ? De demander ?
Assuré ainsi de sa position de force, Durden peut alors demander, quasiment sans risque de refus, son service un peu spécial : "Frappe-moi de toutes tes forces". Pour le coup (sans jeu de mots), la douleur physique serait du côté de Tyler mais c'est encore Jack qui est soumis à la domination car accepter cela c'est faire un pas de plus dans le jeu périlleux auquel il soumet son esprit et la garantie d'une escalade de sa déviance.


Petits boulots

On y voit Jack nous embarquer dans les activités professionnelles de Tyler.

Scène de pure célébration de l'art cinématographique et la seule purement comique du film. D'un point de vue technique elle est sans doute la plus originale.
A ce sujet, mentionnons avant toute analyse la critique acerbe et juste publié dans Rolling stone "Est-ce que Fight club est un bon film ? Il est tellement bourré d'idées explosives et d'humour féroce que les gardiens de la moralité se mettent à crier "danger !", c'est donc un bon film".
Plusieurs niveaux de lecture pour ce passage dont il convient avant tout de préciser comment il est introduit. C'est au moment où Tyler demande à être frapper que Jack choisit d'ouvrir de manière explicite une parenthèse pour le public ("Laissez-moi vous parler de Tyler Durden"), remettant de fait à plus tard cette étape charnière que sera ce premier "affrontement" avec Tyler. Ainsi il procède en quelque sorte à de la métacommunication, comme si l'avancée de l'intrigue du film était mise en arrêt sur image pour que le narrateur puisse développer une anecdote devant nous.
Cela aboutit à une rupture de la temporalité, la deuxième après celle de toute autre nature concernant l'explosion supposée de l'appartement.
En bloquant la scène précédente Jack rend celle-ci intemporelle (ni un flash-back ni une anticipation), il s'agit d'un aparté à la caméra qu'il nous dédie. Tyler s'y joint rapidement puisqu'il va s'agir de ses activités annexes à celle de la fabrication de savon : que ce soit au sujet des misères qu'il fait subir aux plats ("Vas-y dis leur") ou pendant l'explication du changement de bobine ("Dans le métier, nous autres, on les appelle des brûlures de cigarettes"). En plus d'une complicité avec le public, ce passage renforce l'idée d'un film porté par des envies et des concepts et ne répondant pas au formatage des choses qu'il dénonce sans relâche.

Les puritains, qui rejetteront le film avant même de l'avoir vu, ne sont pas oubliés par le biais de l'insertion d'une scène porno dans un dessin animé. C'est en une seconde toute la propagande Disney (ou autre) d'un monde innocent, pacifiste et asexué qui est détruite.
Si l'on relie le contenu de l'ensemble de la séquence et le fait qu'il est raconté par Jack, on peut s'interroger à ce stade sur le moment où il a pu recueillir ces informations. En effet, les deux n'ont eu en tout et pour tout que deux conversations (celle au téléphone exclue) et le seul métier qu'ils aient évoqués c'est celui de la conception du savon ce qui signifie que si elle est placée ici pour des raisons de commodité, cette scène n'a pas d'existence matérielle et répond à un souci de rupture de ton.
C'est aussi un nouvel indice quant à l'existence rattachée à Tyler, simple problème d'acceptation par Jack de son identité comme le dévoilera la suite.
Dans le même ordre d'idée, la question du statut des deux locuteurs est ici intéressante car elle prend le contre-pied du sens d'ensemble. En effet, Tyler apparait clairement comme le personnage concret : celui qui agit, projette les films, fait le service, ... Tandis que Jack fait figure d'hologramme, visible seulement pour son ami et pour nous tel Al dans Code quantum. Tandis qu'il se trouve en plein milieu de la table, nul ne fait attention à lui car il n'existe pas à leurs yeux. Cela fait indirectement penser à l'utilisation de l'écran vert par les studios, sur lequel on peut projeter n'importe quelle image servant de toile de fond à une scène. En l'occurrence ce serait plutôt l'inverse ou un rajout numérique puisque c'est une personne extérieure qu'on intronise dans un cadre existant ainsi Jack évolue dans cet environnement qui lui est inhabituel. L'enjeu de tout cela est encore le même : créer une progression dans la psychologie de Jack afin qu'il adhère à l'idéal de vie de son alter-ego avant d'en devenir par la suite un acteur effectif et inconscient.


Frappe-moi

Après quelques tergiversions, Jack se décide à porter le coup au visage que lui réclamait Tyler puis les deux se détruisent mutuellement avec entrain. Autour d'une bière, ils se promettent de se retaper dessus à l'occasion.

On pourrait de prime abord croire qu'il s'agit de la scène fondatrice de la domination du côté Durden de la force mais comme on l'a vu le rapport dominant-dominé était déjà bien installé depuis un moment. En revanche, elle est fondamentale au sens où c'est ici que se scindent pour la première fois les deux esprits.
Jusque là, Jack s'effondrait devant toute argumentation soit par fascination soit par faiblesse tandis qu'ici, après un besoin de réflexion avant la mise en route, il devient sujet aux mêmes pulsions que Tyler et doit donner des coups et plus que tout en recevoir.
L'attirance soudaine pour ce type d'échange musclé s'explique par une recherche d'identité ("Comment tu peux te connaitre si tu t'es jamais battu ?"), une volonté de connaitre ses limites aussi. Un manque profond habite ces hommes, il est lié à une enfance trop couvée, loin de la loi de la rue et sans présence masculine à la maison ce qui nous sera confirmé par la suite : en somme une éducation les ayant amenés à une conduite propre et efféminée, leur ôtant goût de tout excès et débordements.
Même endormi, un instinct primaire demeure en eux et à l'heure où Jack atteint le degré maximal de lassitude quant à sa vie de demi-mesure, il est logique que ses pulsions refoulées éclatent. Comme déjà suggéré, les deux entrent en symbiose pour le simple plaisir de ressentir la douleur, à ce petit jeu le Jack attentiste du début s'efface un peu plus. C'est de sa voix que sort la proposition de "remettre ça à l'occasion" ce à quoi Tyler réplique par un sourire satisfait, ayant conscience qu'il n'est désormais plus très loin du contrôle total.
Un Tyler d'autre part qui se délecte d'une cigarette après le combat, d'une manière très suggestive qui rappelle la clope post-orgasmique qu'on fume après l'amour.


Paper street

Jack découvre son nouveau logement et tous ses dysfonctionnements. Il répète dés qu'il peut son jeu de démolition Durdenien et cela commence à intriguer les foules. A son travail, on ne la regarde plus de la même façon et lui-même n'y accorde plus sa dévotion d'antan. Sa vie nocturne prime sur tout notamment ses anciens groupes d'entraides, ainsi il perçoit sans sourciller Marla en sortir et poursuit sa route sans s'arrêter.

Cette fois c'est officiel : le nouveau Jack est arrivé, il ne se soucie plus de son confort tout comme il se fiche de faire bonne impression auprès de la hiérarchie. Tout juste se demande t-il où est la voiture de Tyler avec laquelle il l'avait vu (ou cru le voir) quitter l'aéroport.
Au fil du temps, cette maison reclus connait toutes les défaillances imaginables : électricité ; eau ; tapisserie ;... Mais le narrateur traverse cela tel les aléas sans importance. Passé la confrontation avec cet environnement loin de son paradis Ikea ("Quel trou de merde") et la redéfinition de ses besoins vitaux, il ne remettra plus en cause la qualité de cette baraque.
Au moment où il réitère leur affrontement, des clients des bars alentours s'étonnent du spectacle qui s'offre à leurs yeux. Or on peut penser que la bonne partie des loubards qui compose ce mini-groupe ne devraient pas s'offusquer d'une castagne de fin de soirée, classique dans leur univers, et c'est en cela que cette réaction collective constitue un nouvel indice glissé aux spectateurs.

Quand ces mêmes types vont échanger des coups au milieu de la ronde formé par les instigateurs, Tyler précise à l'un d'eux d'enlever sa cravate ce qui préfigure du règlement qu'il va établir et fait la distinction avec un vrai combat de rue. A noté le t-shirt Hustler porté par Tyler, bien dans la veine des aptitudes sexuelles qu'il démontrera par la suite.
Le passage où ils font une partie de golf depuis la maison pour atteindre les entrepôts voisins a donné lieu à une ficelle de tournage inattendu puisque le bruit entendu n'est autre que celui de la camionnette de l'équipe sur lequel retombe une balle.
Un autre passage est d'ordre bien plus essentiel pour la distinction des deux faces du narrateur, quand il trouve cet article "écrit par un organe à la première personne", à partir duquel d'ailleurs on se base pour l'appeler Jack. Il évoque un organe non identifié ayant décidé de prendre le contrôle sur un individu, de modifier ses représentations afin qu'il ne s'autorise plus à faire des mouvements contrevenants.
C'est en substance cette possession d'un individu "étranger de ses actions" que le cerveau déréglé du héros principal est en train d'opérer. Jack saura réutiliser ces citations avant-gardistes quand il provoquera l'explication musclée avec son patron
.
Sa défiance vis-à-vis de son employeur est d'ailleurs déjà amorcée puisqu'à présent il lui balance sans ménagement ses dossiers à la face.
La discussion dans la salle de bain est révélatrice quant à l'univers dans lequel a grandi cet homme, l'absence du père et des convictions sur la vie qui vont avec est sans doute l'élément indissociable de ses névroses. Tyler va poser de manière oratoire une comparaison entre l'expansion mondialiste d'une société et l'égoïsme reproducteur de ce père qui fonde régulièrement une nouvelle famille ("Cet enfoiré il monte des franchises ?").
La peur reconnue implicitement quant au fait de se marier trouve sa source dans cette défection initiale, creusant un fossé immense entre sa vie de gamin et la vie d'adulte qu'il est censé être en train de traverser. Or il n'a pas réussi son saut et se trouve toujours du premier côté du fossé ("Je suis un gamin de 30 ans").
En passant devant l'immeuble d'où sort Marla, Jack se remémore la vie dans un cocon qu'il vient d'abandonner et repart tête haute en pensant qu'il se fiche d'avoir perdu toute possession matérielle, qu'il ne sera pas de ceux qui pleureront après leur compagnie d'assurance la perte de leur patrimoine. Il se sent enfin vivant, dégagé des responsabilités-accessoires qui résultent de la possession d'objets esthétiquement reconnus.


Bienvenue au fight club

Le jeu d'autodestruction de Jack et Tyler connait tant de succès qu'ils poursuivent les combats de manière institutionnalisée dans le sous-sol d'un bar après le service, une forme de boxe clandestine sauf qu'aucun intérêt financier ne rentre en jeu.
Soumis à un règlement en huit points, le "fight club" continue son ascension. Quant à Jack il a maintenant systématiquement l'esprit critique sur le fonctionnement de la société et montre une grande frénésie au combat ce qui l'amène à l'hôpital pour un court séjour. Dans la salle de bains, la discussion porte cette fois sur les personnages historiques que chacun voudrait affronter et les réponses sont plutôt étonnantes.

Les règles édictées par Tyler reflètent l'aspect très étudié et lointain qu'avait ce projet, en effet les deux premières identiques "Il est interdit de parler du fight club" n'existent pas seulement pour rappeler que c'est une activité "au noir" donc illégale mais déjà dans l'idée de vouloir constituer un groupe solide qui aura des missions à exécuter. On perçoit aussi la paranoïa du personnage qui se méfie avant tout de la société mais tout aussi de l'espèce humaine et en fin de compte de lui-même.
Si plus tard le club s'étendra à travers les régions du pays, il ne concernera qu'une portion réduite d'individus à chaque endroit dont peu seront des hommes de la garde rapprochée de Tyler.

Troisième règle : Si quelqu'un abandonne ou est objectivement hors d'état de continuer, le combat est fini. Par là Tyler rappelle que pour tout violent que soit son concept, il ne doit pas viser à se défouler, s'acharner sur quelqu'un ou tuer, son but est libérateur et à ce titre la mort est exclue. C'est même une alternative à la mort, aux envies de suicide, aux dépressions diverses. C'est par cette pratique qu'on se sent vivant.
Citons l'opinion de Jim Uhls (scénariste du film) sur ce point "J'ai trouvé le roman incroyable et unique. Il parle de la stupidité et de l'aliénation et de la manière de s'en libérer par n'importe quel moyen". Pour ce qui est en l'occurrence le moyen employé, peu importe qu'il soit ou non moralement recevable, seul compte le sentiment de libération ressenti par les adeptes.

Quatrième règle : Seulement deux hommes par combat, cinquième règle : un seul combat à la fois. A nouveau, comme pour la troisième règle, c'est les limites de la destruction qui sont fixées. Tyler veut par là mettre de côté tous les amateurs de bastons qui viendraient au club pour les mauvaises raisons, la destruction de l'autre.

Sixième règle : Pas de chemises ni de chaussures. Plus que l'aspect pratique, cette règle est du ressort du statut des participants. En effet, un jean n'est pas moins gênant qu'une chemise pour se battre mais la connotation est bien différente. En laissant leur chemise à la maison, ceux qui sont des "cols blancs" c'est-à-dire la plupart des membres (Jack en premier lieu), laissent aussi au placard leur identité civile. Plus tard, Jack évoque d'ailleurs la confrontation entre un de ses collègues et un pizzaïolo or s'il possède ces informations du fait de sa vie au grand jour elle n'est pas un facteur déterminant au moment du combat, l'employé de bureau ne subissant pas de préjugés face au manœuvre. La profession, l'étiquette sociale qui peut être valorisante à l'extérieur du club n'existe plus à l'intérieur. L'interdiction des chaussures va dans le même sens, celles-ci restant parmi les vêtements de marques les plus connotées.

Septième règle : Les combats continueront aussi longtemps que nécessaire. Par ce point, Tyler précise, en totale accord avec les précédents, que seul un arrêt pour cause de physique trop endommagé est possible. Ici le temps ne vient pas cloisonner (dans une certaine mesure en tout cas) les actes des hommes, il doit être une ressource pour eux et non une contrainte.

Huitième et dernière règle : Si c'est votre première soirée au fight club, vous devez vous battre. Ce point rejoint les deux premiers et sort du cadre strict du combat en lui-même. C'est un moyen pour les organisateurs de contrôler tous les nouveaux entrants, de ne pas avoir des gens seulement là pour observer, ni un phénomène de pygmalions venus soutenir leurs poulains. Ainsi c'est la paranoïa du personnage qui fonde la légitimité de cet article, il veut qu'on lui prouve sa valeur et réitérera ce procédé lors de la formation de son groupe terroriste.

Lors du court passage où les deux créateurs du club circulent en bus, Tyler voit l'occasion d'expliciter sa philosophie de la vie après que Jack lui ait tendu la perche. Il se moque des salles de sport fitness "S'améliorer soi-même c'est de la masturbation mais se détruire soi-même... ". C'est une nouvelle confirmation du goût affiché pour une certaine forme de sadomasochisme.
Il est intéressant de noter que lors des combats sous l'identité de Tyler le héros sort victorieux et acclamé tandis qu'il est ici détruit dans celui où il est Jack. Il le sera encore par la suite face à Bob, c'est-à-dire qu'il y a pour Jack encore une dominance de son côté loser, même si comme il le dit "Il ne s'agissait pas de gagner ou de perdre".
On comprend bien que ce qu'il veut arriver à être s'incarne en Tyler car il le regarde avec fascination lors de son combat alors qu'à l'inverse un Tyler détaché, buvant une bière observe Jack se faire détruire.
"Une fois le combat terminé, rien n'était résolu mais rien n'avait d'importance" Cette phrase du narrateur rappelle si c'était nécessaire que son entreprise ne s'est pas fondée sur une vision rationnelle et n'a pas attrait à faire un quelconque bénéfice financier ou humain.

A l'hôpital Jack se fait recoudre et justifie son état par une chute dans l'escalier, répétant les mots soufflés sans discrétion par un Tyler assis à ses côtés. Evidemment, le docteur n'en perçoit rien et pour cause, c'est un indice de plus au public. La texture de l'image renforce cette idée car Tyler parait distant et flou.

Dans la salle de bains, les choix des personnages historiques qu'ils aimeraient affronter se portent sur Gandhi et Lincoln. On peut croire de prime abord qu'il y a une contradiction puisqu'ils optent pour des hommes s'étant démarqué de la masse pour lutter contre les travers du système. En fait, ils stigmatisent les attitudes de ces utopistes qui ont crus à leurs causes et ont cherchés à améliorer l'homme par la méthode démocratique, c'est-à-dire en utilisant un outil prôné par le système. Or par cette entremise on finit par adhérer au système, on accepte d'être un mouton pour toujours sous prétexte de répondre à un noble principe. Ces hommes sont donc de ceux qui ont instrumentalisés la société plus qu'ils ne l'ont révolutionnés comme tend à le raconter l'histoire.
C'est un des partis pris politiques les plus forts du film car les personnages n'ont pas optés pour des gens détestables comme par exemple la désignation toute simple d'un Adolf Hitler qui aurait envoyé un autre message, ce qui fait dire à Roger Ebert dans le Chicago Sun Times que "Fight club est le film Hollywoodien le plus ouvertement fasciste depuis Un justicier dans la ville". Ces propos venant nous confirmer que sortir de la norme établie, s'attaquer aux vaches sacrés et autres "intouchables" n'est pas encore bien compris dans nos sociétés de liberté d'expression. Il faudrait, pour ne pas choquer l'opinion, tenir compte d'un horizon du possible, de "ce qui se dit" pour être écouter.
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L'auteur : Emilien Bartoli
41 ans, Toulouse (France).
Publié le 14 avril 2010
Modifié le 05 avril 2010
Lu 4 369 fois

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