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Ecole de Psychologues Praticiens - Bilan après 6 ans

Bilan de ma scolarité à l'EPP, 6 ans après avoir décrit mes débuts dans cette école !


Bonjour à vous.

Cet article fait office de suite et fin à mes deux premiers articles consacrés à l'EPP (le Concours et les premiers mois).

Six ans après être entré à l'EPP (j'ai redoublé une année), j'ai été diplômé en septembre 2013. Je souhaite revenir sur ma scolarité, ce qui m'a plu et moins plu. Ce que j'écrirai est à prendre avec des pincettes, pour deux raisons : d'une part c'est purement subjectif, même si ce que je vais présenter peut être partagé par certain (e) s de mes camarades, ça ne reste que mon point de vue. D'autre part, la Direction de l'école a changé, depuis la rentrée 2013. Ce changement va permettre de faire bouger pas mal de choses dans le fonctionnement de l'école. Certaines innovations intéressantes sont déjà en place et d'autres seront sûrement instaurées dans le futur.

Même si certaines choses qui vont suivre peuvent faire penser que je regrette ces six années, c'est loin d'être le cas. Pendant ma scolarité, j'ai non seulement pu étudier des matières qui m'ont intéressé, enseignées par de bons profs (concernant les matières en question, pour les autres j'y reviendrai), mais aussi côtoyer des personnes intéressantes et ouvertes, avec lesquelles j'ai pu développer de réels liens d'amitié. Pendant ces six années, à force de baigner dans ce "bain psy", je sens que j'ai développé une énorme ouverture aux autres et à mon environnement en général. C'est ce que j'appelle "l'effet Psy (cho'Prat')" et je ne suis pas le seul à l'avoir remarqué. Moi qui m'intéresse aux relations humaines et qui suis soucieux de respecter l'autre – et par là me respecter moi-même – ce sont forcément des caractéristiques que je suis heureux d'avoir pu développer au contact des personnes rencontrées pendant mon cursus.

Bref, trêve de parlote, reprenons au début ! : p

Je suis arrivé à l'EPP pour deux raisons principales : intéressé par la Psycho, choix qui s'est fait pendant mon année de Terminale (ES) ; et orienté vers cet environnement école VS université par mes parents, qui étaient peu rassurés à l'idée de voir leur fils suivre une voie à la fac au sujet de laquelle les préjugés sont légion.
En sortant de l'EPP, sans être passé par la case fac, je peux cependant revenir sur ces a priori. Tout d'abord, à la Fac comme à l'EPP, un glandeur restera un glandeur. J'en ai vu un certain nombre pendant ma scolarité et si ceux-ci ont en partie réussi à aller jusqu'au diplôme, je doute qu'ils en auraient fait autant à la Fac. L'EPP est peu sélective : une fois le concours passé, il "suffit" d'avoir la moyenne à toutes les matières pour passer les années et aller jusqu'au bout. Bien sûr ce n'est pas si simple, mais de façon générale je pense que la charge de travail obligatoire est globalement moins importante qu'en Terminale. En Fac, si n'importe qui peut entamer un cursus de Psycho, très peu iront jusqu'au bout, à cause de la sélectivité très forte au niveau Master. J'aurais donc tendance à dire qu'un glandeur ayant passé le concours de l'EPP a plus de chances de décrocher son diplôme qu'un glandeur en Fac. Après, chacun en pense ce qu'il veut.

Ensuite, concernant un certain discours comme quoi l'EPP serait "supérieure" à la Fac, ou "plus reconnue", ou encore "dispenserait une meilleure formation"... Je crois qu'il s'agit en partie d'un fantasme, véhiculé par la Direction et par une certaine classe aisée, dominante à l'EPP, qui la voit comme une "grande école" de Psycho – au même titre que les ESC ou Ecoles d'ingénieurs – versus l'Université qui dispenserait des formations de médiocre qualité. Là encore, c'est un discours à nuancer. Fac et école ont chacune des qualités et des défauts.
Concernant l'enseignement tout d'abord : la différence principale ne se fait pas au niveau de la qualité des cours, mais au niveau des qualités pédagogiques des enseignants et du contenu des cours.
En Fac, les cours sont dispensés par des enseignants (-chercheurs), dont le métier est justement de transmettre des savoirs. Ces enseignements sont rapidement spécialisés (d'après l'image que j'en ai en tout cas) suivant un courant théorique ou une école de pensée particulière. Il s'agit d'un enseignement théorique solide, dans des champs bien particuliers de la Psycho.
A l'EPP, les cours sont en grande majorité dispensés par des praticiens. Des personnes qui exercent en libéral, en institution, en entreprise. Des personnes dont le métier n'est pas d'enseigner et cela se ressent parfois un peu trop : profs qui passent l'heure à lire leur poly/powerpoint, profs dont les qualités pédagogiques sont limites voire inexistantes... Ce qui est enseigné par ces professeurs est souvent intéressant, mais il arrive aussi que l'intérêt immédiat de l'information transmise soit peu évident et il arrive que le prof se perde dans des considérations qui n'ont qu'un rapport très éloigné avec le sujet du cours. De plus, les enseignements de l'EPP sont très généralistes. Les étudiants sont donc sensibilisés à une plus grande variété de courants théoriques, d'approches, d'outils... Si bien que l'on croit parfois survoler les sujets et ne pas assez rentrer dans les détails.

Pour résumer :

Fac :
-Sélectivité sur les dernières années
-Enseignement assuré par des personnes dont c'est le métier et qui ont des connaissances très pointues sur des sujets, qu'ils explorent par ailleurs en tant que chercheurs.
-Enseignement spécialisés en suivant un courant théorique ou de pensée.
EPP :
-Sélectivité à l'entrée.
-Enseignement assuré par des praticiens, proches du terrain mais aux qualités pédagogiques parfois (j'insiste sur le parfois) peu évidentes.
-Enseignement généraliste, qui assure une grande ouverture à la Psycho en général, mais peut parfois manquer de profondeur sur des sujets importants.


Un autre point concerne le fonctionnement interne de l'école.
Si la Fac est souvent pointée du doigt pour les "grèves" étudiantes, ses lourdeurs administratives ou encore ses manques de débouchés (en Psycho je parle), l'EPP n'est pas exempte de remarques du même type. Il apparaît par exemple que, pour une école qui prône la proximité, il y a très peu de dialogue entre enseignants et équipe de Direction. On a pu le remarquer lors de "couacs" récurrents concernant par exemple la façon d'évaluer un enseignement, les compétences pédagogiques de tel ou tel prof, ce genre de choses. Parfois, nous avons l'impression que la Direction n'est pas très au courant des matières enseignées, ni de la façon dont elles le sont. Mais je pense que cela changera avec la nouvelle équipe (qui a entre autres instauré un système de notation des profs et des enseignements !). Nous avons ainsi pu bénéficier de cours donnés par une prof qui était loin d'être experte dans la matière enseignée (neurobiologie), mais qui en plus passait ses 3h hebdomadaires à lire ses fiches, sans savoir répondre aux questions posées par les étudiants... ! Me concernant, ce n'est arrivé qu'une fois, en 4ème année. Mais les anecdotes concernant la tenue des cours et des évaluations sont assez nombreuses.


Les évaluations, parlons-en. Si l'EPP vante son approche "pratique" de la Psychologie, il faut néanmoins s'accrocher avant de commencer à voir sa pratique évaluée... ! Et pour cause, la majorité des matières des quatre premières années sont évaluées par du par cœur, deux fois par an... : les meilleurs élèves sont donc ceux qui arrivent à ingurgiter suffisamment de matière et à la vomir en partiel de la façon attendue par l'enseignant. C'est un système qui tue la réflexion et la créativité. J'ai pu remarquer une sorte d'anesthésie de celle-ci entre mon entrée dans l'école et ma sortie. J'estime ne pas avoir bénéficié d'assez de cours me permettant de réfléchir, d'exposer mes idées de façon créative et personnelle et d'être évalué pour ma réflexion plutôt qu'au nombre de mots-clés présents sur ma copie (véridique !). Ce système d'évaluation fut probablement ma plus grande déception pendant mon cursus : comment former des professionnels de l'humain, capables de construire une réflexion impliquant la mise en lien d'éléments complexes et variés, lorsqu'il est "juste" demandé d'apprendre par cœur et savoir recracher les 4% du cours qui seront évalués lors du partiel ? ! La palme revient à une prof qui, en rattrapage de 2ème année, m'a dit texto : "Je ne vous vois pas Psychologue, vous devriez sérieusement repenser votre choix d'orientation". A l'origine de cette remarque, parfaitement digne d'une psy vous l'aurez remarqué, un exercice s'apparentant à de l'explication de texte, que je n'avais pas réalisé en respectant SA méthode. Ça montre le niveau de recul sur soi dont font preuve certains profs, en nombre heureusement très réduit, mais dont peuvent pâtir certains étudiants plus adeptes de la libre réflexion plutôt que d'un léchage de fesses par copie interposée.


Concernant l'aspect pratique des enseignements, si beaucoup d'évaluations se font sur le par cœur, les enseignements sont bien évidemment de plus en plus portés sur la pratique, au fil de l'avancement de la scolarité. Associez à cela les stages en alternance dès la 3ème année, qui permettent de sortir d'un cadre scolaire pour rentrer peu à peu dans la vie professionnelle, pour peu que le stage le permette, et vous obtenez en effet un cadre pratique très appréciable. Concernant les stages justement : l'avantage de l'école est la possibilité offerte aux étudiants d'émettre des souhaits concernant les stages à réaliser et se voir proposer par l'école des offres qui correspondent – de près ou de loin – à ce qui a été demandé. Ça évite ainsi pour beaucoup d'élèves la recherche de stage qui s'avère, il me semble, très fastidieuse pour les étudiants de Fac. Il s'agit d'un réel confort. Cependant, il arrive parfois que l'école, en souhaitant conserver un partenariat avec certaines structures, attribue quelques stages qui sont loin d'avoir une valeur ajoutée pour des étudiants en Psycho. Des stages pendant lesquels l'étudiant va être observateur, très peu impliqué intellectuellement et professionnellement parlant. Heureusement il ne s'agit pas de la majorité des stages. Mais lorsque ça arrive, l'étudiant est alors contraint de passer 2 jours/semaines pendant un an à ne pas faire grand-chose d'intéressant – et ne rien apprendre au passage, ce qui est quand même l'objectif premier d'un stage.

Les remarques qui précèdent portent surtout sur les quatre premières années. Concernant la 5ème - j'ai fait la spécialisation RH - je serais prêt à la recommencer. J'ai énormément apprécié les différents enseignements, les professeurs ainsi que mon stage. La classe était aussi un point fort de cette année. Là où, pendant les années précédentes, j'avais l'impression d'avoir une classe en partie composée d'enfants pour qui l'école était une cours de récréation, cette 5ème année m'a mis au contact de personnes proches d'entrer sur le marché du travail, sérieuses et agréables. Exit les querelles de maternelle (si si...) des années précédentes ! Bref, du tout bon en fin de cursus !

Concernant les débouchés et la facilité à s'insérer sur le marché du travail, qui sont souvent des raisons incitant les étudiants/parents à favoriser l'EPP vous la Fac, j'ai là aussi des choses à présenter. Tout d'abord, différencions la voie "clinique" et la voie "entreprise".

La première est en effet "bouchée" : peu de postes de libre pour des besoins sans cesse grandissants, en particulier dans les grandes villes. La facilité de trouver un emploi dépendra beaucoup de la structure qui accueille : si elle recherche une personne "tout-terrain", le diplômé EPP sera sans doute favorisé. Si la recherche porte sur une personne disposant de bases théoriques solides dans un domaine bien précis, le diplômé de l'Université aura sans doute plus de légitimité. Ajouter à cela que, en-dehors de Paris, l'EPP semble peu connue et ses étudiants peu voir par "favorisés" par rapport aux diplômés d'Université. De façon générale, une personne empruntant la voie clinique doit être préparée à la très forte probabilité d'exercer non pas un métier en CDI temps plein, mais des métiers à temps partiel, régulièrement en CDD. L'on peut qualifier cette situation de "précaire", pour reprendre le terme à la mode, mais je pense qu'au contraire elle est toute indiquée dans un champ d'exercice tel que la Psycho : ça permet de se confronter à une variété de situations, de contextes, de responsabilités, d'apprentissages. On aime ou pas, mais ça semble être le lot de pas mal de personnes.

Concernant la voie "entreprise", les embauches suite à un stage de fin d'étude sont bien plus fréquentes que pour les élèves ayant suivi une spécialisation clinique (pour lesquels ça n'arrive d'ailleurs jamais, ou presque). L'emploi-type est un CDI ou CDD en temps plein, trouvé quelques semaines après l'obtention du diplôme, si ce n'est avant dans le cas d'une suite donnée à un stage de fin d'études. Par contre, la concurrence sur les postes qui nous sont accessibles est constituée de jeunes diplômés d'ESC, d'IAE, fac ou d'autres formations RH, et il est souvent bien difficile de faire valoir son diplôme face à des employeurs qui ne jurent que par des formations "prestigieuses", ESC bien souvent. A nous donc de démontrer notre légitimité d'intégrer une entreprise et d'y apporter des valeurs et des considérations proches de l'humain.


Un mot concernant le point d'orgue, le "climax" de notre formation : la préparation et la soutenance du Mémoire de recherche. Tous les ans il y a des déceptions concernant l'accompagnement – ou plutôt le non-accompagnement – d'un petit nombre d'étudiants, à qui est attribué un Maître de Mémoire qui semble tout simplement ne rien avoir à faire de la personne sous sa responsabilité. Cela aboutit à des situations ubuesques de soutenances auxquelles le Maître de Mémoire est absent pour une raison inconnue, après n'avoir rien fait pour accompagner l'élève pendant sa recherche et la rédaction du document qui doit permettre d'obtenir son diplôme – excusez du peu. Encore une fois, j'ai bon espoir que ce genre de situations soit corrigé par la Direction dans les années à venir, sachant que la plupart des étudiants disposent tout de même du suivi nécessaire au bon déroulement de leur travail de recherche.


Pour finir, je me rends compte que j'ai plus abordé les points négatifs de l'EPP plutôt que ses aspects positifs, qui sont bel et bien présents (et heureusement). Je conserve de ces six années des apprentissages intéressant, de belles rencontres et surtout une évolution personnelle que j'ai vu s'opérer au fil des ans. Il s'agit d'un cursus qui permet de s'éveiller à l'autre, ses enjeux, sa place dans le monde ainsi qu'à soi-même. Il s'agit d'un enseignement dont l'objectif est de fournir à l'étudiant une multitude d'outils et lui permettre de sélectionner et de s'approprier ceux qui constitueront sa "boîte à outils" personnelle et professionnelle. Si l'on est intéressé par tout ça, il faut foncer. Je suis persuadé que nous avons plus à apporter sur le marché du travail, en entreprise en particulier, que des étudiants venant de filières qualifiées de "prestigieuses", type ESC, qui n'apportent selon moi pas grand-chose d'utile à la Société... Avis fondé sur des retours de personnes ayant évolué dans diverses ESC, dont plusieurs "top 4". Il y a une réelle place pour les Psychologues aujourd'hui, place qui reste malheureusement sous-estimée par un système favorisant certaines "élites". C'est donc à nous, encore une fois, de nous légitimer auprès de nos employeurs et montrer ce que nous pouvons apporter de différenciant et d'utile à ceux qui nous entourent !


Ca faisait un bout de temps que je souhaitais écrire ce témoignage. Je l'ai fait en écrivant mes idées telles qu'elles se présentaient à moi, sans forcément chercher à les ordonner parfaitement. Ça fait du bien de laisser libre cours à tout ça ! Donc si vous avez des questions ou réactions – et je pense qu'il y en aura – ne pas hésiter à me contacter. De plus, je suis présent depuis 5 ans au forum d'orientation de Passy/Daniélou et continuerai à l'être. Au plaisir de vous y voir, pour les personnes concernées !

Pour finir, j'ai malgré tout eu la chance de suivre un tel cursus, dans un tel établissement. Ces six années sont passées à une vitesse folle, ce qui prouve bien des choses !
L'auteur : Vianney .....
36 ans, Nanterre (France).
Publié le 21 janvier 2014
Modifié le 13 janvier 2014
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