"Dans le droit fil de l'esprit des Cités Obscures, mais avec un autre angle de vue, Schuiten et Peeters présentent leur nouveau projet : Les Portes du Possible, une manière de "fiction prospective" ou d'"utopie fictionnelle" qui s'ingénie à explorer les conjectures les plus inattendues concernant notre proche futur. L'ouvrage se présente comme une série de vingt sujets (un thème par page, chacune pouvant se lire indépendamment de toutes les autres) et emprunte la forme visuelle d'un "vrai-faux" journal combinant textes et images. Selon les sujets traités au fil des parutions et des rubriques (politique, sport, science, arts, etc.) de ce journal imaginaire, Schuiten et Peeters ont situé leur publication à divers moment du futur (2024,2030,2037, etc.), mais toujours dans un avenir "à portée de main". Au menu des thèmes choisis : les manipulations génétiques, les changements du climat, les nouveaux matériaux, les transports ferroviaires, les rites funéraires, l'évolution de l'Europe, etc." (Présentation Casterman)
Les auteurs prolifiques des "Cités Obscures" nous proposent une nouvelle expérience avec ce journal imaginaire en hommage Jules Verne. Contrairement à "L'Echo des Cités" qui rapportait l'actualité des Cités, "Les Portes du possibles" fait la chronique des événements de notre monde. Les auteurs se projettent dans un futur plus ou moins proche, pour rester dans les limites du vraisemblable. Et loin d'imaginer un monde total qui relèverait de l'utopie grandiloquente, Schuiten et Peeters s'amusent à ouvrir quelques fenêtres sur la vie quotidienne de ce futur. Les thématiques sont ainsi proches de nos préoccupations actuelles. Et même si notre présent laisse présager des horizons peu radieux, c'est toujours sur un ton souriant et avec des pages colorées que "Les Portes du possibles" aborde le futur. Une manière de balayer la tendance à tout traiter sur le mode catastrophique. Pour élargir le plus possible de notre horizon, les auteurs racontent des anecdotes des quatre coins du monde (comme ce terrain de golf suspendu dans les airs au Japon), pour sortir d'une vision strictement européenne (ce qui ne les empêche pas de transformer le Parlement Européen en parc de loisirs).
"Les portes du possible" sont aussi l'occasion pour Schuiten et Peeters de réinscrire la bande dessinée là où elle est née, c'est-à-dire dans les journaux. Avant d'être réunies dans l'album publié par Casterman, ces pages ont paru en Belgique dans les pages du Soir et de Morgen et en France dans le Courrier International. Les auteurs ont véritablement investi l'espace d'une page de journal avec une recherche d'équilibre entre le texte et l'image.
Cette réflexion sur la mise en page ressort aussi dans l'album. "Les portes du possible" ont été pensées sur le mode du livre-objet et constituent ainsi un autre clin-d'œil à Jules Verne. Ses éditions originales chez Hetzel étaient le fruit d'un travail élaboré, notamment sur la place des gravures par rapport au texte. "Les portes du possible", elles, forment un livre carton. La planche s'ouvre de manière verticale sur l'ensemble des deux pages, tout en évitant la gouttière d'un livre papier qui marquerait une coupure au milieu de la planche. L'œil peut donc naviguer librement et se perdre dans cet espace imaginé par les deux auteurs.
Vous pouvez aussi découvrir les planches de cet album en grand format à la Bibliothèque Nationale de France. L'exposition présente toutes les pages du journal et différents travaux des auteurs autour de l'œuvre de Jules Verne (sérigraphies, illustrations de romans). Vous pouvez la visiter jusqu'au 15 janvier 2006 (informations sur le site de la
BNF, actualités culturelles).
Titre : Les portes du possible
Auteurs : Schuiten - Peeters
Editeur : Casterman